Dans les années 90, Richard Sackler veut révolutionner le monde de l’industrie pharmaceutique en proposant un antalgique reposant sur des opiacés. Conscient de se frotter à une levée de bouclier, il prétend son nouveau produit comme non-addictif. Ce qui est complètement faux. Mais Purdue Pharma met en place un marketing agressif qui convainc les médecins, en visant les régions minières défavorisées et souvent la cible d’accidents du travail provoquant des douleurs chroniques.
L’OxyContin est donc prescrit à des milliers, bientôt des millions de patients, rempli les caisses de Purdue Pharma au détriment des patients qui sombrent peu à peu dans la dépendance. Mais lorsque cette addiction commence à faire monter la violence dans tout le pays, les procureurs et même la DEA, instance luttant contre les trafics de drogues, s’intéressent au laboratoire pharmaceutique.
Mini-série en 8 épisodes
La mini-série Dopesick s’inspire de ce cas très réel, dont l’affaire est encore en cours aux USA, et du livre reportage Dopesick : Dealers, Docteurs, et la compagnie pharmaceutique qui ont rendu l’Amérique accro de Beth Macy.
En 8 épisodes, elle retrace l’affaire en mêlant plusieurs timelines et personnages impliqués. C’est ainsi qu’on suit en parallèle :
- Richard Sackler incarné par le génial Michael Stuhlbarg qu’on a pu voir dans Premier Contact, Call me by your name ou encore La forme de l’eau. Il est dépeint comme un neuroatypique incompris de sa famille désirant plus que tout prouver sa valeur et suivre l’oeuvre de son oncle qui avait proposé un médicament ayant fait la fortune de la famille. Pour l’accomplir, il est prêt à tout, y compris à créer une crise majeure d’opiacé.
- Billy Cutler incarné par Will Poulter qu’on a pu voir dans Le Labyrinthe, The Revenant, Midsommar. C’est un jeune commercial ambitieux au sein de Purdue Pharma qui va peu à peu se retrouver face à un cas de conscience.
- Le docteur Samuel Finnix, incarné par Michael Keaton (Batman, Birdman, Beetlejuice), est l’un des premiers docteurs à prescrire l’Oxycontin et sera donc aux premières loges pour en voir les effets dévastateurs notamment sur Betsy Mallun, une de ses patientes, incarnée par Kaitlyn Dever (Detroit, My Beautiful Boy, J. Edgar). Ce sont les personnages les plus touchants de la série.
- Mais on suit également les enquêteurs, Rick Mountcastle, incarné par Peter Sarsgaard qui incarnait déjà un procureur dans The Batman, et Randy Ramseyer font un duo d’enquêteurs drôles et touchants recevant l’aide de Bridget Meyer, directrice de la DEA incarnée par la très belle Rosario Dawson (Sin City, Luke Cage, Men in Black2).
La construction narrative enchaînant les époques, lieux et personnages différents peut être difficile à suivre par moment, même avec l’affichage déroulant des dates, cependant, la trame narrative reste assez simple puisqu’il s’agit d’une trame souvent utilisée. La série commence avec le témoignage des victimes, pour le grand jury. Puis on remonte le temps, suivant en parallèle la famille Sackler cherchant un moyen de faire de l’argent rapidement et une petite ville minière en lutte avec la misère, avant de voir apparaître au fur et à mesure les effets de l’Oxycontin, alors que les enquêteurs commencent leur travail d’enquête. Tout cela est adroitement mis en parallèle de manière assez logique. Ce qui nous fait aboutir, à la moitié des épisodes, aux conséquences et les différentes luttes menées par chacun des personnages.
La qualité au rendez-vous
Toute la force de la série est de traiter avec adresse chacun de ses personnages. Les faits sont accablants, aussi elle choisit de ne pas en rajouter une couche pour se concentrer sur les motivations de chacun. Ce qui suffit à montrer l’extrême différence entre chacun des personnages. Progressivement, les difficultés et surtout les faiblesses des personnages sont exposées ce qui peut rendre le visionnage particulièrement difficile, surtout avec le sujet. Ainsi, il n’y a pas vraiment de héros intouchables même si, certains enquêteurs sont incorruptibles (on pense un peu au film de Brian de Palma à plusieurs reprises). Les comédiens choisis, de grands talents, parviennent à rendre ces personnages attachants et touchants.
Pour raconter son histoire, Dopesick va embrasser plusieurs genres : médical, scandale politique, thriller politique, manipulation et mensonge, drame social, sans que le spectateur ne s’en rende vraiment compte. Car l’approche est quasi documentaire avec la qualité d’écriture d’une grande série. A cela s’ajoute la mise en scène, léchée, la direction artistique et la photographie tout aussi soignées qui réussissent à rendre sexy des bureaux de la DEA (un vrai tour de force en soi), donnant une série à la qualité indéniable. On n’est pas loin des standards HBO en termes de qualité, on pensera à l’image d’un Mad Men par exemple.
Pour compléter
Si vous souhaitez compléter votre visionnage, vous pouvez regarder le documentaire de Nan Goldin “Toute la beauté et le sang versé” qui raconte la lutte de l’artiste contre la famille Sackler. Ce sont ses manifestations qu’on voit d’ailleurs dans la série.
Pour suivre Sophie: https://linktr.ee/sophiahautrice?fbclid=PAAab_FJs3tpgbVXVyBsNZeB2jF9SJk85ZcaTNKMpgs15t_pA6muk9tkVyhyc
Plus de séries : https://jamesetfaye.fr/category/les-podcasts/geek-en-serie/
[…] parler de notre société. Il utilise le scandale de OxyContin, déjà traité dans la minisérie Dopesick. Un drame qui a profondément marqué la société américaine. L’inhumanité de ces grands […]